Épisode 6 : Et si votre état d’esprit pouvait vous faire changer d’avis sur le vieillissement?

 10 Jan, 2024 |  28 mins

Joignez-vous à notre animatrice, Jennifer Botterill, qui discute avec la Dre Alexandra Fiocco, professeure de psychologie à l’Université métropolitaine de Toronto, de la pleine conscience et de son lien avec une vie meilleure à long terme, tant sur le plan physique que mental.

Remarque : tous les balados ont été enregistrés en anglais seulement.

Transcription de l’épisode

Présentateur publicitaire

Vous écoutez la série de balados Au-delà de l’âge.

Jennifer Botterill

Bonjour et bienvenue à Au-delà de l’âge, un balado exclusif de Manuvie. Manuvie a à cœur le bien-être physique, mental et financier de la population canadienne. Dans cette série de balados, nous discutons de santé globale et de vieillissement avec des spécialistes du secteur, pour rester en bonne santé plus longtemps, quel que soit votre âge. Je suis votre animatrice, Jennifer Botterill. Aujourd’hui, je suis en compagnie de la Dre Alexandra Fiocco, professeure au département de psychologie de l’Université métropolitaine de Toronto et directrice du laboratoire de recherche sur le stress et le vieillissement en bonne santé de Toronto, en Ontario.

Nous allons parler de l’état d’esprit et de la possibilité de changer d’avis sur le vieillissement. Bienvenue, Docteure Fiocco

Dre Alexandra Fiocco

Merci de m’accueillir, Jennifer. Je suis très heureuse d’être ici.

Jennifer Botterill

Excellent. Nous sommes ravis de vous avoir avec nous aujourd’hui. Alors, merci. Pour commencer, pourriez-vous nous parler de vous et de ce qui vous a amenée à vous intéresser à ce domaine?

Dre Alexandra Fiocco

Certainement. Comme vous l’avez mentionné, j’enseigne au département de psychologie de l’Université métropolitaine de Toronto. Vous savez, mon parcours dans le monde universitaire n’a pas toujours été linéaire. Ce qui m’intéressait d’abord était de comprendre le stress et ses effets sur la santé. Au début de ma formation universitaire, mes recherches se sont concentrées sur la dépression et l’anxiété comme résultats d’intérêt.

Quand j’ai commencé mes études supérieures, ma grand-mère a reçu un diagnostic probable de maladie d’Alzheimer, une forme de démence. Cette expérience m’a amenée à m’intéresser à la compréhension de cette variabilité au sein de la population vieillissante. En ce qui concerne la pleine conscience, je dirais que c’est le fruit de mon intérêt personnel pour les études et les exercices contemplatifs. La pleine conscience s’est vraiment naturellement intégrée à ma plateforme de recherche qui, à l’origine, portait surtout à l’association entre le stress et le vieillissement cognitif.

Je pense que ces trois éléments réunis décrivent mon travail.

Jennifer Botterill

Oui, excellent. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur la manière de décrire correctement la pleine conscience?

Dre Alexandra Fiocco

Oui. Il existe plusieurs définitions différentes. Celle que j’utilise habituellement est que la pleine conscience, c’est d’être attentif de manière particulière, volontairement, dans le moment présent, dans un état d’esprit d’ouverture et d’acceptation. La méditation est un moyen reconnu de développer la pleine conscience. Je considère la pleine conscience comme une compétence. Certains diront que c’est un trait de caractère qu’on a à la naissance, mais c’est une compétence qui peut être développée intentionnellement avec le temps.

Jennifer Botterill

Oui. C’est bon à savoir. Et je pense que c’est quelque chose que beaucoup essaient d’intégrer davantage dans leur vie, dans leur carrière. Maintenant qu’on sait ce que signifie la pleine conscience, diriez-vous qu’il y a un lien entre la pleine conscience et la santé en général?

Dre Alexandra Fiocco

Une réponse courte serait oui.

Jennifer Botterill

Oui.

Dre Alexandra Fiocco

Je dirais, sans hésiter, qu’il existe un lien entre la pleine conscience et la santé. De nombreuses recherches ont été menées au cours des 20 dernières années, voire plus, et la plupart d’entre elles ont débuté par des études sur les moines bouddhistes. Donc, la pleine conscience et la méditation de pleine conscience sont fondées sur les enseignements bouddhistes. On a constaté que les moines bouddhistes avaient tendance à obtenir des notes plus élevées pour la compassion et le bien-être. Leur cerveau est aussi différent de celui des novices qui ne méditent pas.

À la suite de ces recherches, on s’est demandé si on pourrait former les novices à la pleine conscience, et les chercheurs ont constaté que oui, c’est possible. Une grande partie de ce travail a commencé avec les travaux de Jon Kabat-Zinn et de Richie Davidson, qui ont montré que s’exercer à la pleine conscience pendant huit semaines pouvait réellement améliorer le bien-être psychosocial et modifier le cerveau.

D’une manière générale, il a été prouvé que la pleine conscience pourrait améliorer ou diminuer la perception du stress chronique. Elle peut diminuer la dépression et les symptômes d’anxiété. Elle pourrait aussi alléger les problèmes de sommeil ou la sensation de fatigue. Certaines recherches suggèrent qu’elle favoriserait également le rendement cognitif. Pour ce qui est des causes de ces associations, il reste encore beaucoup à faire pour en comprendre le fonctionnement.

Mais si on parle de ce qui se passe sur le plan biologique, des recherches montrent que l’exercice de la pleine conscience peut réellement modifier le cerveau. Ce qui vaut pour tout type de comportement, en fait. Nous savons que l’expérience change le cerveau. Par conséquent, il est prouvé que l’exercice de la pleine conscience modifie le cerveau. Il est associé à une augmentation de la connectivité cérébrale.

Par exemple, la connectivité entre l’amygdale, qui est le centre de la peur dans le cerveau, et le cortex préfrontal, qui est en quelque sorte la partie du cerveau nécessaire à la pensée et à la planification supérieures. Il a également été associé au volume de l’hippocampe, une structure cérébrale importante pour l’apprentissage et la mémoire, et qui intervient dans nos systèmes sensibles au stress.

On constate donc que l’expérience modifie le cerveau. L’exercice de la pleine conscience peut vraiment améliorer notre réseau neuronal. C’est peut-être pourquoi on observe certaines améliorations psychosociales, sociales et comportementales après l’exercice de la pleine conscience. Maintenant, on ne sait pas encore quel est l’élément exact de la pleine conscience qui améliore la fonction cérébrale et ces résultats psychosociaux.

Et c’est là qu’il faut faire plus de recherches.

Jennifer Botterill

Les avantages potentiels sont donc considérables. Il faut réfléchir à la manière de s’exercer et de continuer à apprendre et à évoluer. Si on pense à notre santé mentale et physique, à quel point notre état d’esprit peut-il l’influencer? Existe-t-il des moyens d’inverser les effets négatifs sur la santé qui peuvent être causés par l’état d’esprit?

Dre Alexandra Fiocco

Si on parle d’état d’esprit, on constate qu’il existe des recherches portant précisément sur ce sujet. On entend souvent parler d’un état d’esprit fixe par opposition à un état d’esprit de développement. Je verrais ça plutôt comme un spectre entre la fixité et le développement. L’état d’esprit peut varier en fonction du domaine, comme être plus porté à la fixité qu’au développement dans sa carrière ou, par exemple, être plus enclin à adopter un état d’esprit de développement quand vient le temps de faire de l’exercice.

On se déplace donc le long de ce spectre. Je dirais qu’un état d’esprit fixe est celui qui présume qu’il est impossible de développer une compétence ou d’améliorer, par exemple, sa santé ou son bien-être mental, physique ou spirituel. Ce serait un exemple d’un état d’esprit fixe. On a l’impression qu’il n’y a vraiment rien à faire, ce qui a des effets négatifs profonds sur le bien-être d’une personne.

Par conséquent, ce qu’on veut faire dans le contexte de la pleine conscience et de l’exercice à la pleine conscience, c’est essayer de changer son point de vue, en particulier quand il n’est pas très utile ou propice au bien-être. Une part de ça est l’état d’esprit. Il faut comprendre entre autres que nous abordons certaines situations avec des idées préconçues.

Cette idée peut être, par exemple, notre conception du vieillissement, en pensant qu’on est trop vieux pour faire quelque chose. Je suis trop vieux pour apprendre quelque chose de nouveau. En soi, c’est un état d’esprit fixe qui peut limiter une personne et ce qu’elle choisit de faire dans sa vie pour progresser.

Jennifer Botterill

Tout à fait. D’après votre expérience, avez-vous constaté que certains types d’exercices de pleine conscience semblent plus efficaces que d’autres pour garder le corps en santé?

Dre Alexandra Fiocco

Pour ce qui est des différentes formes d’exercices de pleine conscience, je ne peux pas dire que l’un soit meilleur que l’autre. En fait, ce que j’incite mes participants à faire, c’est de trouver l’exercice qui leur convient le mieux. Si l’exercice vous convient, vous serez plus porté à le faire. Bon. L’important, c’est de s’exercer chaque jour.

Développer une compétence comme la pleine conscience se fait comme pour toute autre compétence. Pour devenir un bon pianiste, il faut s’exercer tous les jours. C’est la même chose avec la pleine conscience. C’est une compétence qui se développe. Par conséquent, la forme d’exercice n’est pas nécessairement l’élément le plus important.

Il faut aussi le faire intentionnellement.

Jennifer Botterill

Est-ce que je peux vous demander de nous en dire un peu plus à ce sujet? Combien de temps est-ce que ça prend? Je pense que tout le monde a une vie occupée et un travail prenant. Quel type d’engagement recommandez-vous aux gens pour ce qui est de s’exercer? Un peu de temps suffit-il? Il est évident qu’il faut être constant. Selon vous, combien de temps faut-il y consacrer?

Dre Alexandra Fiocco

Je suggère de toujours commencer par ce qui est possible pour vous, dans votre situation. C’est une question intéressante, en fait, parce que si on pense au programme de réduction du stress par la pleine conscience, créé par Jon Kabat-Zinn dans les années 1970, ce programme dure huit semaines. Il est fondé sur des enseignements bouddhistes, mais il a été créé pour être accessible aux Occidentaux.

Je pense qu’on recommandait de s’exercer au total 45 minutes par jour. Depuis, je pense que si on suit une formation encadrée aujourd’hui, on part du principe qu’il faut s’exercer 30 minutes par jour. J’ai de la difficulté à affirmer qu’il faut s’exercer 30 minutes par jour, parce que j’ai l’impression que c’est déjà un obstacle pour les gens.

Trente minutes, c’est très long pour beaucoup de personnes. C’est pourquoi je suggère toujours de commencer par ce qui est possible. Si vous avez seulement cinq minutes pour vous entraîner, alors faites cinq minutes. Mais faites cinq minutes chaque jour.

Jennifer Botterill

Une dernière question à ce sujet. Pensez-vous que les gens commencent à voir des résultats assez rapidement s’ils trouvent ce temps? Est-ce qu’ils remarquent les avantages et commencent à les ressentir assez rapidement?

Dre Alexandra Fiocco

Je pense que ça dépend de la personne. C’est vraiment difficile à dire. Ça dépend vraiment de la personne. Mais on entend parler de ces anecdotes qui montrent que les participants le remarquent. Et quand j’utilise le terme « participant », je parle de personnes inscrites à un programme, pas nécessairement dans le contexte d’une recherche, bien que je dirige généralement ces groupes dans le contexte d’une recherche. Mais en général, les participants commencent à le remarquer.

Et c’est ce qui compte. C’est là que ça commence, en remarquant ce qui se passe et vos comportements habituels, ce qu’on appelle le pilote automatique. On prend conscience des expériences sur le plan des sensations physiques, des émotions, de l’information qui nous parvient ou même de pensées qui se manifestent. Ainsi, les gens remarqueront peut-être avec le temps qu’ils sont plus calmes physiquement.

Ils peuvent se rendre compte qu’ils sont moins réactifs qu’avant à leur environnement, ou qu’ils ont manqué un moment. C’est donc un autre point de discussion que j’aime avoir avec les participants, je veux qu’ils racontent leurs moments de pleine conscience. Peut-être remarquer quelque chose de nouveau durant leur promenade quotidienne ou des moments manqués.

Vous avez peut-être été réactif durant une interaction, mais vous vous en rendez compte après coup. Vous y pensez donc un peu plus, parce que c’est nouveau aussi, de reconnaître, même après coup, qu’on aurait probablement pu faire X, Y, Z différemment. Ça fait partie de l’exercice et du processus de développement de la compétence.

Jennifer Botterill

Oui, absolument. Pour nous tous, l’idée d’être calme et moins réactif peut s’appliquer à de nombreux domaines et à différents environnements, de manière très pertinente. Pouvons-nous parler un peu du vieillissement? C’est un sujet qui vous tient particulièrement à cœur. Quelle est donc l’importance d’un état d’esprit positif quand on parle de vieillir?

Dre Alexandra Fiocco

Je dirais que c’est très important d’avoir un état d’esprit positif par rapport à beaucoup d’expériences dans notre vie. Le vieillissement est un processus que nous vivons tous. J’ai vu un jour un macaron ou un dicton qui disait que le vieillissement est la chose la plus populaire au monde. Tout le monde le fait.

C’est vrai. Tout le monde vieillit. On vieillit dès la naissance, mais pour une raison quelconque, on considère les 20 premières années comme celles du développement. Ensuite, c’est le vieillissement en déclin. Nos croyances sur le vieillissement auront des répercussions sur notre mieux-être et sur nos activités, ce qui peut améliorer notre bien-être ou le diminuer au fil du temps.

Ainsi, l’état d’esprit et les croyances sur le vieillissement sont liés à notre survie et à notre qualité de vie. Vous savez, durant nos dernières années.

Jennifer Botterill

Mmm. Vous avez donc évoqué les deux directions qu’on peut prendre côté perspective et perception. Comment une perspective négative du vieillissement peut-elle nuire à la santé?

Dre Alexandra Fiocco

Beaucoup de recherches montrent que les stéréotypes négatifs sur le vieillissement peuvent nuire à la santé. Il n’est pas rare d’avoir une perception négative du vieillissement. C’est quelque chose qui est en quelque sorte ancré dans notre société, malheureusement. L’âgisme est très répandu. C’est quelque chose qu’on apprend enfant, et beaucoup interprètent cette mentalité et ces croyances comme des faits.

L’adoption de stéréotypes liés au vieillissement est associée à un taux de survie plus faible. On est donc plus susceptibles de mourir prématurément. Elle est aussi associée à un risque plus élevé de troubles cognitifs et de problèmes de mobilité fonctionnelle, ainsi qu’à une réduction de la qualité de vie et de la satisfaction envers la vie. Ainsi, penser que le vieillissement n’est qu’une pente descendante, qu’il est automatiquement associé au déclin physique et cognitif, aura des répercussions sur notre santé physique et cognitive plus tard.

Par conséquent, une perception négative du vieillissement peut avoir des effets néfastes sur notre vie et notre bien-être plus tard.

Jennifer Botterill

Mmm. Oui. On va faire une petite pause et se retrouver tout de suite après ce message.

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Jennifer Botterill

Nous voici de retour à Au-delà de l’âge. Docteure Fiocco, vous avez mentionné l’âgisme, un terme qu’on entend souvent. Pourriez-vous expliquer à nos auditeurs ce qu’est l’âgisme, au juste?

Dre Alexandra Fiocco

Oui. L’âgisme est un préjugé ou de la discrimination envers un groupe d’âge précis. Généralement, l’âgisme fait référence aux croyances quant aux adultes plus âgés. Il faut aussi savoir qu’on pourrait tout autant avoir des sentiments négatifs envers les jeunes adultes. Ce sont de fausses croyances sur un groupe précis en raison de son âge. L’âgisme est la notion qu’en vieillissant, on devient moins utiles à la société, plus faibles, qu’on perd des capacités cognitives, et qu’on n’est plus attrayants physiquement.

Je pense que c’est un énorme stéréotype sur le vieillissement qui influence réellement notre mentalité et nos comportements envers la sous-population des personnes plus âgées. Ce que je trouve vraiment fascinant à propos de l’âgisme, c’est qu’il y a beaucoup d’« ismes » dans ce monde, et celui-là est une forme de préjugé contre notre moi futur. Par conséquent, c’est autodestructeur.

Je sais que plusieurs ne réalisent pas à quel point ce peut être néfaste, parce que comme je l’ai dit plus tôt, quand on adopte ces croyances âgistes, elles influencent vraiment le comportement. Si vous ne faites pas d’activité physique parce que vous croyez être trop vieux, les répercussions sur votre vie seront considérables.

Jennifer Botterill

Mmm. L’activité physique est donc un exemple. Que recommanderiez-vous d’autre pour contrer ou combattre le facteur de l’âgisme?

Dre Alexandra Fiocco

Oui, parce que c’est vraiment un phénomène omniprésent. Je pense que simplement c’est très répandu dans notre société. Le terme « antivieillissement » et « antiâge » sont partout. Et ça me rend vraiment folle. On est contre quelque chose. On peut être contre la violence, mais on ne peut pas être contre le vieillissement. C’est un processus qui touche tout le monde. Et si on y résiste, eh bien, comment résister à quelque chose qui va se produire quoi qu’il arrive?

Bon. On crée donc de la souffrance en résistant à un processus tout à fait naturel que tout le monde vit. Un autre élément est le fonctionnement cognitif. En vieillissant, certaines personnes se rendent compte qu’elles oublient des choses. Ça fait des années que j’oublie des choses. Je vais continuer à en oublier. Je ne mets pas ça sur le dos du vieillissement.

Je l’attribue au fait que je suis extrêmement occupée, que je mène souvent plusieurs tâches de front. C’est dû au stéréotype du vieillissement qui veut qu’en vieillissant, on perde ses capacités cognitives. Eh bien, je vais commencer à m’inquiéter un peu plus, à me demander si je commence à faire de la démence si j’oublie quelque chose. Est-ce que je me dis que c’est parce que je vieillis?

Je pense au langage qu’on utilise. Je mets mes oublis sur le compte du vieillissement, quand je suis peut-être simplement très fatiguée ou je n’ai jamais encodé l’information dès le départ. Je n’ai jamais appris l’information parce que je n’y portais pas attention. On constate que l’âgisme se manifeste aussi de cette manière. Si on pense qu’avec l’âge, nos facultés cognitives vont décliner et qu’on ne peut rien y faire, on est moins enclins à rester curieux.

On est moins portés à s’inscrire à un cours qui nous permettrait d’apprendre quelque chose de nouveau. On est moins tenté de pratiquer des activités stimulantes sur le plan cognitif, qui sont importantes pour la santé du cerveau.

Jennifer Botterill

Voilà d’excellentes suggestions pour tous. Vous avez parlé de la société. Quels changements aimeriez-vous voir dans la société pour combattre l’âgisme qui semble si répandu?

Dre Alexandra Fiocco

C’est une question très importante. On vit dans une société quelque peu âgiste. Les termes « antivieillissement » et « anti-âge » sont donc utilisés à tort et à travers. On voit donc des cliniques et des publicités à la télévision, et l’industrie antivieillissement fait des milliards de dollars en profitant de la perception âgiste de cette société. Ainsi, en vieillissant, on suppose qu’on devient moins attirant.

Je constate une certaine évolution grâce aux baby-boomers. On voit des adultes plus âgés représentés, par exemple, dans des publicités. Mais c’est un phénomène relativement nouveau. Sachez qu’il y a 20 ans, tous les gens apparaissant dans une publicité étaient très jeunes et avaient une certaine apparence. J’espère donc voir un changement dans ce domaine, surtout à cause des baby-boomers.

En fait, tout commence par la personne. Pour revenir à la pratique de la pleine conscience, elle permet aussi de reconnaître que tout et tout le monde est interconnecté. Bon. Je pourrais pointer du doigt et dire que je veux que la société commence à faire ça, mais il faut que le processus commence à l’intérieur. J’aimerais que chacun prenne conscience de la façon dont une mentalité âgiste et l’âgisme se manifestent dans sa vie.

Pour y arriver, il faut prendre conscience de nos pensées, de nos comportements, de nos émotions, et de ce que nous consommons pour ce qui est de l’alimentation et des médias. Vous savez, ce sont tous des éléments qui font partie de notre vie quotidienne. On peut ensuite faire de meilleurs choix. Mais ça commence avec soi.

On peut aussi informer nos pairs, en discuter avec eux. Ce peut être une sorte de conversation mondiale. Et une fois que la conversation est mondiale, il y a un mouvement de changement dans la société à l’échelle individuelle. C’est quelque chose que j’aimerais qu’on fasse tous ensemble.

Jennifer Botterill

Tout à fait. Il ne faut pas oublier de commencer par soi-même et de prendre la responsabilité individuelle de créer un meilleur ensemble collectif. Et ça fait partie de la prise de conscience que vous avez évoquée et de l’information continue sur l’acceptation du processus de vieillissement. Quels conseils pourriez-vous donner à une personne déterminée et désireuse de changer d’état d’esprit pour l’aider à vraiment accepter le processus de vieillissement?

Dre Alexandra Fiocco

Comme ces croyances sont largement enracinées, ce n’est pas facile. Je pense que ça demande des efforts, tout comme il faut des efforts pour développer la pleine conscience. Désapprendre quelque chose peut être difficile. Ce qui ne veut pas dire que c’est impossible et, en fait, ça en vaut vraiment la peine. Mais il faut y mettre des efforts. C’est pourquoi je conseille toujours de participer à des ateliers ou à des webinaires, d’acquérir des connaissances sur l’importance de l’état d’esprit et sur le vieillissement, et sur le fait que même si on vieillit, la croissance, le développement et la guérison sont encore présents, et ces choses continuent plus tard dans la vie.

Je pense donc qu’il faut avant tout s’informer, soit en participant à des ateliers, soit en lisant des livres sur la pleine conscience. Je vois la pleine conscience comme le fondement d’un vieillissement significatif. Ce que j’enseigne à mes participants est de commencer à adopter cette notion de caractère éphémère. Il faut se rendre compte que tout ce qui naît se dissipe également.

Donc, tout ce qui se présente disparaîtra aussi. Qu’il s’agisse de sentiments négatifs, positifs ou neutres, tout a une fin, et c’est correct. Et c’est de l’accepter. Il faut composer avec cette idée du caractère éphémère des choses. Je pense que la peur est une des raisons qui expliquent le caractère négatif du processus de vieillissement et, bien sûr, de la mort.

La peur est très présente. Et quand il y a de la peur, il y a de la résistance. Et en présence de la peur, une forme de résistance est la stigmatisation. Ce sont donc des concepts qui ont réellement une incidence sur la vie quotidienne et la capacité à avoir une qualité de vie qui est significative pour soi et qui favorise le bien-être. Il est par conséquent très important d’accepter le caractère éphémère des choses.

Ce peut être une source d’anxiété pour plusieurs. Au fil du temps, plus on en prend conscience, plus on est à l’aise avec cette idée. Ensuite, il faut exprimer sa gratitude.

Jennifer Botterill

J’ai fait mes études de premier cycle en psychologie. Je me souviens même d’avoir appris l’idée de l’expression de la gratitude, et encore aujourd’hui, c’est un exercice que je tente de faire très régulièrement. Je trouve que c’est un exercice très utile.

Dre Alexandra Fiocco

Oui, et je pense que la mentalité y joue un rôle, comme pour tous ces concepts, qui sont des concepts psychologiques interdépendants. Donc, quand on parle de l’expression de la gratitude, l’état d’esprit est très important, c’est lui qui choisit aussi sur quoi on concentre notre attention. Je pourrais par exemple me concentrer sur la douleur que j’ai au bas du dos, ou je pourrais exprimer ma gratitude pour tout ce que je peux faire d’autre.

C’est pourquoi la pratique de la gratitude est aussi, selon moi, un élément très important pour changer son état d’esprit. Et pour ce qui est d’adopter un état d’esprit de développement, il s’agit en partie de rester curieux.

Jennifer Botterill

Oui, assurément. Est-ce qu’il y a d’autres mythes ou idées fausses sur l’âgisme, la pleine conscience ou l’acceptation du processus de vieillissement qui méritent d’être démystifiés, selon vous?

Dre Alexandra Fiocco

Beaucoup. Plusieurs intègrent la pleine conscience dans leur vocabulaire sans vraiment connaître sa mise en pratique en tant que telle. Certaines personnes pensent que la pleine conscience et la méditation sont synonymes. Mais il ne faut pas oublier que la pleine conscience est une compétence. La méditation est un moyen reconnu de mettre cette compétence en pratique. Et quand on commence à s’y exercer, on voit beaucoup d’idées fausses à ce sujet.

Exercer la pleine conscience, c’est faire le vide dans son esprit. Ce n’est pas ça. La pleine conscience, comme je l’ai dit, est définie par la personne. Il faut être attentif. Être attentif à tout ce qui se présente en fait d’expériences momentanées, qu’elles soient positives, négatives ou neutres. Ce n’est pas non plus une solution miracle. La pleine conscience est une compétence développée au fil du temps et perfectionnée à l’aide d’exercices quotidiens continus.

Aussi, quand on commence à s’exercer, il ne s’agit pas de bloquer les pensées négatives ou de faire le vide dans son esprit. Ni de rester immobile. On peut se livrer à différents exercices où on n’est pas nécessairement assis sans bouger, et même dans ce cas, si on doit bouger, c’est possible, mais avec intention.

C’est la manière dont le mouvement est fait qui est importante. Ce n’est pas non plus d’être toujours heureux. Certaines personnes pensent que la pleine conscience et le développement de la pleine conscience consistent à être toujours heureux, ce qui n’est pas le cas. Et les émotions ne sont que des éléments d’information. C’est la manière de gérer ses émotions qui peut devenir un problème. C’est donc un peu ce qui lie la pleine conscience à l’âgisme.

C’est vraiment cette perception du vieillissement et certaines des idées fausses sur le vieillissement que j’essaie de faire connaître aux gens et de combattre. L’âgisme est omniprésent, et comme nous ne reconnaissons pas certaines croyances comme étant âgistes, nous ne nous rendons peut-être même pas compte que nous avons adopté certaines de ces mentalités, pensées et croyances.

Un de ces stéréotypes sur l’âge est que le vieillissement est synonyme de déclin. Mais en réalité, je perçois le vieillissement comme une occasion et une croissance continues. Chaque fois que je m’adresse à des personnes plus âgées de la société dans le cadre de différentes conférences, j’aime toujours parler de certains de mes modèles. Encore là, les modèles ne sont pas toujours des adultes plus âgés, et il faut donc en trouver.

Voilà donc quelques éléments que je voulais souligner concernant les idées fausses sur l’âge. Il y a une croissance, un développement, et c’est tellement important de s’en rendre compte. Je pense aussi que ça nous aide à apprécier le processus de vieillissement.

Jennifer Botterill

C’est tout. Il faut non seulement accepter le processus de vieillissement, mais aussi l’apprécier. Vous nous avez transmis tellement d’informations intéressantes qui, j’en suis certaine, seront extrêmement précieuses pour nos auditeurs. Si vous pouviez résumer un ou deux points à retenir de notre discussion d’aujourd’hui, quels seraient-ils?

Dre Alexandra Fiocco

D’accord. Je pense que le premier serait qu’il y a toujours des occasions de croissance, d’apprentissage et de guérison. Et je dirais que le prochain point concerne l’état d’esprit. On peut faire quelque chose pour changer son état d’esprit, pour passer d’un état d’esprit fixe à un état d’esprit de développement. Adopter cet état d’esprit de développement facilite le processus de vieillissement et notre bien-être à mesure qu’on vieillit.

Jennifer Botterill

Incroyable. Merci, Docteure Fiocco. Durant notre discussion, vous nous avez tous incités à acquérir des connaissances, et discuter avec vous a été toute une expérience. Nous vous en sommes extrêmement reconnaissants. Merci, Docteure Fiocco.

Dre Alexandra Fiocco

Merci.

Jennifer Botterill

Voilà. Merci d’avoir écouté un épisode du balado Au-delà de l’âge, une exclusivité de Manuvie. Dans le prochain épisode, nous allons nous entretenir avec Joyce Lum, de Toronto, en Ontario, qui racontera son histoire de résilience en tant que survivante d’une crise cardiaque. N’oubliez pas de visiter notre site Web manuvie.ca/vivre-en-meilleure-sante pour d’autres conseils, vidéos et contenus de Manuvie qui peuvent vous aider à vivre plus longtemps en santé, quel que soit votre âge.

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Les pensées et les opinions exprimées sont celles de l’animatrice et de ses invités; elles ne représentent pas nécessairement celles de Manuvie.

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